Description
Nicolas Kurtovitch publie son premier recueil de poésie, Sloboda, en 1973. Il a 18 ans. S’il édite à compte d’auteur, c’est que l’urgence de cette prise de parole est pour lui une évidence. Qui ne cessera de l’habiter, le conduisant à être l’un des auteurs les plus prolifiques de sa génération.
Né le 20 décembre 1955 à Nouméa, il est le cadet de la fratrie. Sa famille maternelle est installée en Nouvelle-Calédonie depuis 1843. Elle compte parmi les siens l’un des premiers français ayant posé le pied sur ce qui n’était encore, aux yeux de l’Occident, qu’une « terra incognita » : Jean Taragnat.
Son père est lui un migrant yougoslave, qui a quitté Sarajevo en 1945. Et repartira assez vite vers l’Europe.
Si l’enfance est une période peu explorée, du moins de manière explicite, dans l’œuvre de Nicolas Kurtovitch. La volonté d’habiter le présent, obstinément, et de penser le monde qui l’entoure est par contre une constante.
Poète, il va au fil des années s’essayer également à tous les autres genres : nouvelles, essai, théâtre et roman, Good night friend puis, Les heures italiques suivi de Dans le ciel splendide.
C’est que Nicolas Kurtovitch témoigne avant tout d’un refus profond, vital, de tout ce qui, peu ou prou, enferme, réduit, et même définit, au sens où la définition vise à fixer, arrêter, limiter.
Très tôt, après sa scolarité calédonienne, il quitte son île. La lointaine métropole pour ses études bien sûr, mais aussi et avant, la Nouvelle-Zélande et l’Australie pour une pérégrination. Horizons divers pour un homme qui marche. Un arpenteur, qui s’engage somme toute assez logiquement dans des études de géographie. Licencié de l’université d’Aix-en-Provence, il enseigne cette discipline dans un collège de Lifou, l’une des îles de l’archipel calédonien. Aujourd’hui, après de nombreuses années (25années) comme directeur du lycée protestant Do Kamo, qui demeure l’un des vecteurs les plus performants de promotion pour les jeunes Kanak, il est chargé de mission pour la culture et les dispositifs jeunesses à la province Sud puis au Gouvernement de la Nouvelle Calédonie. Il prend sa retraite à la fin de l’année 2015.
Car Nicolas Kurtovitch est aussi l’une des premières voix calédoniennes d’origine européenne à s’être explicitement interrogée sur la nature de la relation entre les communautés en présence sur sa terre natale. Et à avoir posé sans ambiguïté la reconnaissance du peuple premier comme condition du vivre ensemble.
Dans l’essai collectif Être caldoche aujourd’hui il écrit : « Oui, si l’on veut, à l’affirmation d’une identité calédonienne, mais à condition de ne pas oublier que l’homme libre reste indéfinissable, ni le fait incontournable qu’ici est une terre kanak »
Cette conviction traverse son travail d’écrivain. Et s’est même traduite à deux reprises très concrètement par des écritures à quatre mains avec des auteurs kanak. Dire le vrai/Tell the truth, un recueil de poèmes, avec Déwé Gorodé. Tous deux inscrivent ainsi dans l’histoire littéraire calédonienne un dialogue entre des voix qui, affirmant leur diversité, manifestent dans le même temps la possibilité d’une parole partagée.
L’écriture théâtrale s’imposera plus tardivement dans son parcours, avec notamment Le Sentier Kaawenya. Puis c’est l’aventure de Les dieux sont borgnes, pièce qu’il cosigne avec, cette fois, le dramaturge kanak, Pierre Gope. Elle est jouée en Avignon en 2003 dans une mise en scène d’Yves Borrini et Nicole Kurtovitch, de la compagnie Le Bruit des hommes. Nicolas Kurtovitch a publié en 2004 une pièce intitulée La Commande, Jouée -(Nicole Kurtovitch, Kesh Bearune)- au Centre Culturel Tjibaou en 2006 par la troupe kalachakra dans une mise en scène de Marise Courbet.
En 2007, il a succédé à Charles Juliet et quelques autres au Randell cottage, résidence d’écrivains située à Wellington, en Nouvelle-Zélande. Et il a été dans ce cadre le poète invité de la remarquable revue néozélandaise de poésie, Poetry NZ. Il est par ailleurs publié dans de nombreuses autres revues : Archipel des lettres, revue du Salon du livre insulaire d’Ouessant ; Carnavalesques, revue de poésie contemporaine publiée par les éditions Aspect de Nancy, Voix d’encre, etc.
En 2008 il est invité en tant que lauréat du Prix de poésie Antonio Viccario au festival de Poésie de Trois Rivière (Quebec) et en 2009 au festival de poésie de Mexico et de Morilla. En 2014 il est invité au festival de poésie de Sarajevo, un rendez-vous, pour lui, très marquant. En 2017 il est invité pour une résidence de deux mois à Shanghai par l’Association des écrivains de Shanghai. En 2019, invité en résidence par l’association CALI durant 4 mois, il est le résident du Sémaphore du Créac’h, dans l’île de Ouessant. Il a été de nombreuses fois invité au Salon de Papeete, Lire en Polynésie, ainsi qu’au salon Pirogue au Vanuatu. Au cours de ces rencontres importantes, il tisse de solides liens d’amitié avec des poètes du monde entier, réduisant encore et toujours les frontières entre les Hommes.
Toute son œuvre en témoigne, Nicolas Kurtovitch est homme de déplacement et de lieux : des lieux qui bruissent de la parole des hommes, mais aussi, surtout peut-être, de leurs silences, partagés ou non, des questions que renvoie à chacun la présence de l’autre. Elle est aussi parole « de solitude et d’exil », pour reprendre le titre d’un de ses poèmes paru dans L’Arme qui me fera vaincre.
Dans une langue attelée à se dépouiller des oripeaux du paraître, son écriture est donc tout à la fois acte d’existence et de résistance, traversée par les thématiques croisées de l’enracinement et de l’exil : un enracinement vécu, un exil pleinement accepté.
S’il pratique depuis de nombreuses années l’aïkido et est un lecteur assidu des poètes japonais, c’est avec la conviction que l’art est de l’ordre du geste, lancé par un homme qui marche et s’applique à être là, simplement, debout dans la conscience de sa marche, de sa solitude et de son exil, mais également de sa totale liberté.
Membre de l’Association des écrivains de Nouvelle-Calédonie après en avoir été le premier président, et de la Société des gens de lettres, Nicolas Kurtovitch, Chevalier des Arts et des Lettres depuis 2004, a reçu en 2003 le Prix poésie du Salon du livre insulaire d’Ouessant, pour Le piéton du dharma. Le Prix Prix Vi Nimö des lycéens en Nouvelle Calédonie en 2011 pour son recueil Les arbres et les rochers se partagent la montagne, Ed Vent d’ailleurs et le Prix Popaï de la littérature Calédonienne en 2011 pour son roman : Les heures italiques, Éditions Au vent des îles, Tahiti, Papeete.
Il est aujourd’hui lu et étudié dans les universités de la région. Il est par ailleurs à l’origine de la création du centre géopoétique de Nouvelle-Calédonie, en lien avec l’Institut de géopoétique initié par Kenneth White.
Nicolas Kurtovitch
Ajoutez une note